Du fantassin à la chaussée

La grande route est une invention romaine. C’est le censeur Appius Claudius qui approuva les plans et adjugea les travaux de la via Appia, celle qu’un poète de l’époque impériale appellera plus tard la « reine des routes » et qui, de Rome à Capoue, traverse la Campanie sur 195 kilomètres, dont 28 de remblais au milieu des marais Pontins.

La route romaine est faite de couches de pierres, de taille continûment décroissante ç mesure que l’on va des fondations à la surface – des pierres liées au mortier, l’ensemble étant finalement recouvert de dalles. Sous la République, les routes de ce type sillonnent l’Italie.

Sous l’Empire, elles s’étendent aux provinces et ceinturent le monde romain: au nord, l’une traverse les Alpes par le Brenner, atteint le Danube, dont elle suit le cours jusqu’à la mer Noire, puis descend la côte occidentale de celle-ci jusqu’à Constantinople. À l’est, une route relie la mer Noire à la mer  Rouge en longeant partiellement le cours de l’Euphrate, puis traverse Alep et Damas jusqu’à al-Aqaba. Au sud, une route double la côte méditerranéenne, de la péninsule arabique jusqu’à Gabès, et, de là, coupant derrière les Aurès, rejoint Oran.

À l’ouest, quatre routes partent de Lyon en éventail vers la Moselle, Paris, Tours et Saintes; une autre relie Narbonne à Bordeaux, tandis qu’une dernière tire un trait depuis Paris, entre les quatre cilles de l’Ouest avant de traverser les Pyrénées,de gagner Pampelune et enfin la route qui traverse la péninsule espagnole d’est en ouest, de Tortosa à La Corogne, en partie par le cours de l’Èbre. En Espagne, une autre route suit à peu près la côte méditerranéenne et remonte jusqu’à Cadix, où descend celle qui, de La Corogne, contourne le Portugal par l’est.

Les routes romaines ont été construites pour le déplacement des forces armées et celui des dépêches officielles, et non pour accélérer la circulation commerciale. Le cadastre les a bientôt prises comme appui pour dessiner ses lotissements; militaires et administratives, elles n’ont servi au voyage civil que par raccroc. Elles n’en continuent pas moins de frapper l’imagination quand, au hasard d’un voyage, on en découvre un tronçon comme celui qui surplombe le Danube dans la traversée des Portes de fer, entre Carpates et Balkans, taillé par les légionnaires de Trajan en l’an 104 de notre ère.

Il faudra ensuite attendre John Loudon McAdam, ingénieur écossais, inventeur en 1815 d’un revêtement fait de pierre concassée et de sable, agglomérés au rouleau compresseur. Le procédé sera introduit à Paris en 1849. Puis s’y ajoutera le goudron. L’autoroute n’arrivera que dans les années 20. La première sur le sol français, celle de l’Ouest, commencée en 1936, ne sera achevée qu’après la Seconde Guerre mondiale.

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